Être Maman... un rêve inaccessible ?
Les Fécondations in Vitro
Tout d'abord, je
dois préciser que je suis une belge vivant en Belgique car c'est un
point important pour la suite de mon histoire.
Effectivement, chez
nous, les fécondation in vitro (je les nommerai fiv) sont assez simples
d'accès. A l'époque où nous avons entamé nos premières démarches, nous
n'avons même pas du rencontrer un psychologue. Nous avons néanmoins
appris que c'est nécessaire, voire indispensable, depuis.
J'avais
29 ans quand nous avons fait notre première fiv en juin 2002. Dix autres
ont suivi... en vain, évidemment, car dans l'autre cas, cet article
n'aurait pas lieu d'être.
Je vivais relativement bien la période
pré-implantation, les piqûres, les hormones à taux élevés... Après le
replacement des embryons, j'étais plus stressée évidemment car je
mettais tant d'espoirs dans cette technologie... trop certainement.
Un
jour, il a fallu prendre une décision : tentions-nous une douzième fois
la fiv sans que les médecins puissent nous proposer un changement de
protocole quelconque ? Mettions-nous une fois encore tous nos espoirs
dans une expérience déjà maintes fois désastreuse ?
Je dois
préciser que notre entourage ignorait tout de nos démarches car nous ne
voulions pas chagriner nos parents et amis. Inutile de souffrir à 15
quand seules 2 personnes peuvent pleurer. Car oui, chaque fin de cycle
négatif provoquait chez nous un grand moment de désespoir. Tenir la tête
haute et continuer à travailler et à vivre comme si rien ne se passait
m'a probablement aidé à garder le cap envers et contre tout.
Lorsque
mes 35 ans sont arrivés et alors que je pouvais enfin demander à
implanter deux embryons (la loi belge interdit d'en placer deux si la
femme n'a pas 35 ans et si elle a déjà eu un début de grossesse... même
si celle-ci n'a duré que quelques petites semaines dans mon cas), j'ai
décidé de ne plus aller plus loin dans cette voie.
Durant 3 ans,
j'ai donc pris le temps de réfléchir aux solutions qui s'offraient
encore à nous. Durant la narration de cette période, je vais parler à la
première personne du singulier car mon mari m'a permis de prendre mon
temps et de cogiter. Il faut dire qu'il a la chance d'être déjà le papa
d'une grande jeune fille.
La procédure d'adoption
En
mai 2011, je suis venue vers lui au bureau (oui, il faut savoir que
nous travaillons ensemble) en tenant précieusement dans la main une
enveloppe bien remplie de papiers pour lancer une procédure d'adoption !
Et oui, il m'avait fallu 3 ans pour faire mon deuil de l'enfant
biologique, celui qui grandirait dans mon ventre et me ressemblerait et
c'était une bonne chose. Il faut savoir que je porte encore ce deuil sur
moi car depuis quelques années, je ne m'habille plus qu'en noir. Je n'y
avais jamais porté attention car ce changement avait été progressif
mais la psychologue de l'association où nous nous sommes inscrits par la
suite l'a remarqué... et me l'a fait constater par la même occasion.
Voilà
où intervient la notion de pays car chez nous, en Belgique, nous devons
suivre des cours pour pouvoir introduire une demande d'adoption, quelle
soit nationale ou internationale. Je ne pense pas qu'il soit aussi
difficile de devenir parents adoptifs en France, ne serait-ce déjà que
parce que ce pays voisin n'a pas signé la convention (hyper restrictive)
que d'autres pays comme la Belgique ont signée.
En Septembre
2011, nous avons donc assisté à nos 2 premières séances d'information
générale. C'était des jeudis soir, dans une salle regroupant une
vingtaine de couples plus ou moins motivés de bonnes intentions.
En
Octobre, nous avons continué avec 3 séances en groupe plus restreint
(une petite dizaine de couples). Nous y avons fait de chouettes
rencontres avec lesquelles nous sommes toujours en contact. Ces séances
de formation (et non plus d'information) étaient longues et fatigantes.
Nous y étions mis en situation d'abandon, en situation de déménagement,
de dépaysement extrême... Nous y avons aussi appris à prévoir les
réactions d'un enfant qui vient de loin (on nous a assez vite conseillé
l'adoption internationale car l'adoption nationale est encore plus
compliquée !).
Vinrent ensuite les rendez-vous chez la
psychologue. J'ai détesté être "mise à nu" par une personne qui m'est
étrangère, détesté devoir raconter un passé qui m'est personnel, détesté
devoir écouter le passé de mon Homme car ce que j'en savais était ce
que je souhaitais savoir. Si j'avais voulu d'autres détails, je les lui
aurais demandé ! J'en suis sortie meurtrie... et en pleurs pensant que
cette entrevue était un échec, que tout était perdu. Mais non, la psy
avait aimé notre franchise et notre sincérité et nous donnait, après la
3ème séance, son feu vert pour aller plus loin.
Vint ensuite la
rencontre avec Mme la Juge du Tribunal de la Jeunesse car oui, en
Belgique, on passe au tribunal pour avoir un "certificat d'aptitude"
officiel pour l'adoption. Elle nous l'a octroyé sans souci et avec le
sourire et ce fut donc un vrai soulagement.
A ce moment vint enfin
le doux moment de l'annonce à nos familles. Ma belle-fille savait déjà
car elle avait du écrire une petite lettre à l'attention de la Juge afin
de lui dire ce qu'elle pensait de notre décision. Vu qu'elle avait été
contente de notre choix, ça n'avait pas posé de problème. Ce fut ensuite
le tour de ma Maman qui avait perdu l'espoir d'être une Mamy. Quelques
larmes de joie ont perlé dans nos yeux en lui apprenant la nouvelle. Mon
Papa, lui, fut surpris mais content aussi. Il faut dire que le temps
passant, chacun pensait que je ne souhaitais pas être mère. Le sujet
était même, je pense, devenu tabou car personne n'en parlait jamais.
L'étape
suivante fut difficile physiquement car nous avons du chercher et
trouver un traducteur agréé par la justice afin de traduire notre
dossier en anglais. Il a fallu courir dans tous les sens, en période de
fêtes de fin d'année, afin de pouvoir envoyer le dossier bien ficelé dès
début janvier 2013 vers l'Inde.
Alors que nous pensions être cool
et tranquille dans une pile de dossier en attente en Inde, nous avons
appris en août 2014 que ce pays mettait en pause ses attributions
d'enfants. Le nouveau système instauré chez eux quelques mois plus tôt
posait des problèmes et ils ne s'en sortaient pas ! L'association a dès
lors proposé de nous inscrire conjointement en Haïti, chose rarissime
car, lorsqu'un dossier est accepté dans un pays, il est impossible d'en
changer de cette façon. C'est dire si la situation était désespérée.
Nous
voilà donc repartis vers les démarches bureaucratiques : ambassade,
notaire, ... afin de remettre un nouveau dossier en bonne et dûe forme
aux autorités de notre nouveau point de chute. Celui-ci est parti en
octobre 2014.
Il faut savoir que nous ne demandons pas à partir
dans un pays plutôt qu'un autre mais nous devons choisir, c'est
obligatoire !!!
Inde ou Haïti... là n'est vraiment pas l'important !
Et maintenant ?
Depuis, c'est l'attente
longue, pénible et triste. Comment ne pas penser au merveilleux coup de
téléphone qui nous apprendra qu'un enfant nous est attribué. La
différence avec le début de ce périple, c'est que, maintenant, nous
sommes entourés de nos familles qui nous aiment et qui nous soutiennent
dans cette attente.
Certains ont peur de nous chagriner ou de nous
embêter en nous questionnant mais c'est toujours agréable pour moi de
partager mon attente, mes espoirs, mes désillusions. Ca montre aussi
qu'on s'intéresse à ce qui nous arrive. Evidemment, ce n'est pas comme
si j'étais enceinte car, dans ce cas, tout le monde s'intéresserait à
l'échéance, au sexe du bébé à venir... là, c'est silence et calme plat
dans la plupart des cas et j'ai appris à vivre avec ça, cette
indifférence, cette négligence et ça m'a permis de faire le tri dans mes
"amis" (on se comprend...).
L'attente continue donc et j'ai
appris, après 4 ans d'attente pour l'adoption mais surtout 13 ans
d'attente d'un enfant, ce que le mot patience voulait dire. J'ai parfois
des difficultés à me contenir lorsque j'entends des femmes se plaindre
après quelques mois d'attente vaine mais j'ai compris maintenant que
chacun perçoit le temps qui passe différement.
Un jour peut-être...
Pour clôturer cet
article, j'en reviens au noir de mes vêtements car j'ai promis de porter
à nouveau des couleurs lorsque mon enfant apparaîtra et je posterai
alors la plus belle photo qui soit sur tous mes réseaux sociaux. Soyons
honnêtes : ça ne sera pas simple car j'ai beaucoup de difficultés à
m'accepter en couleurs
Le noir m'irait-il si bien que je ne peux m'en défaire ?
Un article interpelant à lire car il illustre bien aussi mon ressenti :
http://www.moustique.be/148/un-enfant-tout-prix